A Tbilissi, un étudiant politisé va indirectement inciter Simon à prendre les armes –
Pour Lillian Vicktory, l’erreur impardonnable des nouvelles autorités pro-européennes à Kiev avait été de vouloir se démarquer brutalement du « grand frère » russe. Puis d’avoir, pour corser le tout, pris la décision de limiter l’utilisation de la langue russe parlée dans un bon tiers du pays. Le tout sur fond de radicalisation de la lutte pour le pouvoir entre les candidats pro-européens et pro-russes. Ces derniers symbolisant la corruption endémique du gouvernement en place. En Ukraine aussi le « tous pourris » faisait florès. De ce fait, dans la bronca qui suivit, on confondit pratiques politiques contestables et Politique. Ce qui dressera les uns contre les autres, les extrémistes de Maïdan à Kiev et les tenants d’une fidélité historique et sociale envers la Russie.
Vicktory ne cessait de souligner dans ses interventions que ce sont toujours les minorités radicales qui l’emportent mais que tous trinquent. À son grand désespoir, l’Ukraine n’avait pas échappé à cette malédiction. L’idéologie radicale des deux camps avait préparé l’intervention des Russes. Le refus d’un fédéralisme régional tel qu’il existe dans bien d’autres pays européens, l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, la Grande Bretagne, ou comme avait su le faire la Tchécoslovaquie en se scindant en deux Etats, devenant la Tchéquie et la Slovaquie, aura fini de précipiter le pays dans une guerre civile stupide.
Son analyse des évènements de Maïdan dans sa revue n’avait pas plu à tout le monde. Pour lui, Poutine n’avait pas l’intention de passer pour le dindon d’une farce qu’il n’avait pas préparée. En 2013, il avait fait racheter pour 11 milliards d’euros de dette d’État de l’Ukraine et réduit d’un tiers le prix moyen du gaz fourni. Une facture que l’Ukraine savait ne pas pouvoir honorer. Elle cherchait maintenant son salut vers l’Europe et ses euros. Une volte-face que l’on n’appréciait pas dans l’état-major russe qui se voyait encerclé par l’OTAN laquelle en profitait pour installer des systèmes anti-missiles et des radars espions aux frontières afin de surveiller le système de défense russe. Une situation intolérable, d’autant plus intolérable que les militaires au Kremlin savaient depuis longtemps la domination des Américains en matière d’intrusion, d’espionnage et de guerre électronique. Pas question de leur faciliter les choses, comme le dira un jour Poutine – non sans humour – à un journaliste américain qui avait pu obtenir un entretien en tête-à-tête.
Même si la posture des politiques russes n’était pas dénuée d’arrière-pensées afin de remobiliser un pays accusant encore un retard de croissance anormal, en face on ne faisait pas mieux. Les Américains avec leur politique d’encerclement venaient de relancer la guerre froide. Washington en profitait pour ressouder les pays européens toujours frileux autour de l’OTAN. Cela faisait dire à un commentateur russe qui soulignait l’importance de la présence militaire américaine dans le monde et les zones de conflits armés dans lesquelles elle était impliquée : « Si tous les pays du monde ont une armée, en Amérique, l’armée a un pays. »