Le 22 novembre 2012 les cheminots belges en grève ont réussi à faire mieux que le célèbre magicien américain, David Copperfield. Ils ont carrément fait disparaitre un train venant de Cologne pour Paris avec tous ses passagers. Le train 9472 Liège /Paris prévu à 17h 49 confirmé sur l’ensemble des écrans a d’abord été annoncé avec une heure de retard, puis deux heures  et, comme à 19 heures il n’était toujours pas arrivé… hé bien il a disparu ! Les centaines de voyageurs qui attendaient sur les quais de la gare de Liège et Bruxelles pour Paris n’ont pu que constater que l’on leur avait chipé leur train. Reconnaissez que c’est fort. Les services de la gare étaient dans tous leurs états. Une histoire belge pareille, qui ferait arriver ou partir des trains fantômes, n’a pas fait une ligne dans la presse.

Celle-ci s’intéresse plutôt aux cinquante neuf kilos que Bart De Wever a perdu pour gagner l’indépendance de la Flandre. Avec pour première étape symbolique l’accès à la mairie d’Anvers. Une ville majoritairement flamande, où est né Bart De Wever. Les flamands, ne cesse de nous expliquer la presse belge, veulent une Flandre libre et débarrassée des Francs. Qu’à Dieu ne plaise, je serai ravi que Bart De Wever, arrive, non pas à se séparer de la Belgique francophone, mais tout simplement à nous rendre ce qui nous appartient à nous les Francs. Cette belle province du nord des Ardennes n’aurait jamais du être dans l’orbite des marchands flamands, bien contents d’en profiter à l’époque où le charbon était la première des énergies disponibles. Durant le XXème siècle, La Belgique francophone aura épuisé son bois, ses eaux et ses minerais des plateaux ardennais pour développer ses industries sidérurgiques, y compris françaises, pendant que les provinces flamandes développaient ce qui fera leur richesse à ce jour, les services portuaires, commerciaux et notamment les services financiers. Depuis quelques années, la formation du PIB est nettement en faveur des régions néerlandophones. Des régions qui durant des décennies se sont considérées comme maltraitées par les communautés francophones et ses élites au pouvoir. Le côté revanchard de la demande d’indépendance de la communauté néerlandophone n’a rien de récent.  Anvers restera allié des Pays Bas lorsque les néerlandais envahissent la Belgique en 1831 obligeant les français à venir  au secours de leurs cousins du nord. Déjà dans le passé, le 1er octobre 1795, la France de Napoléon victorieuse des autrichiens rétablira la paix religieuse (entre catholiques et calvinistes) et civile et restaurera la prospérité économique de la région. Quiconque se plonge dans l’histoire tourmentée de la Belgique à la frontière de plusieurs empires y trouve de bonnes raisons pour voir nos francs du Nord réintégrer la communauté française.

Les conflits historiques entre la partie française et hollandaise ont déjà plusieurs siècles et leur mémoire est bien enracinée dans l’inconscient collectif des citoyens belges. Un vieux dicton néerlandais adopté par les bataves symbolise bien leur état d’esprit ; « Wie zijn verleden ontkent beeft geen toekomst » (Qui renie son passé, ne mérite pas son avenir).  Pas étonnant que cela ressurgisse à la moindre tension. Tout sépare la Flandre de la partie francophone de la Belgique. D’abord, et on semble l’avoir oublié dans nos livres d’histoire, la Belgique francophone est le berceau originel de la France.  Les ancêtres des Belges francophones sont à l’origine de quelques unes des pages les plus prestigieuses et les plus importantes de notre histoire de France.

Les Francs nous viennent de la région de Liège et j’invite tous les français intéressés à visiter la ville avec un bon livre rappelant les sources originelles de notre nation[1].  Ce sont les belges du 4ème siècle qui sont les francs d’origine, les fondateurs de ce qui deviendra la France ? Une France qui d’ailleurs ne cessa de faire la guerre aux Néerlandais et aux Flamands durant la guerre de Trente ans. Souvenez-vous de la bataille de Cyrano au siège d’Arras contre les Pays Bas Espagnols. Combien de nos lecteurs savent où se trouve Aix la Chapelle ?  Proche de Dinant, elle est la terre d’origine des mérovingiens, où naquit Pépin de Héristal, ville plus connue sous le nom de Herstal où se fabriquent les révolvers de la marque.  Petit fils de Pépin de Landen et fils de Begge, ce franc mérovingien va épouser une carolingienne d’Aquitaine, Plectudre qui sera supplantée par la belle Alpaïde Dodon d’Avroy, dont les frères assassinèrent l’évêque Lambert qui s’opposait à l’union du roi avec Alpaïde. Cela se passait à Liège dans les années 700. Naitront de cette union, deux fils dont Charles Martel – héros de la bataille de Poitiers contre l’envahisseur musulman –  père de Pépin le Bref et grand père de Charlemagne. C’est encore à partir de Liège que nous devons l’important développement des collégiales catholiques les plus prestigieuses d’Europe, propriétaires de magnifiques bibliothèques. Le clergé érudit fut à l’origine d’une profusion unique d’institutions de toutes natures et de la langue des élites de l’époque : le latin. C’est Alcuin, un des moines de la cité de Liège, venu d’Angleterre à la demande de Charlemagne, qui inventera l’écriture moderne du latin[2]. Tout cela parce qu’un dénommé Clovis partit à la conquête de la Gaulle toute entière dans les années 500. La conquête de l’hexagone par un belge, reconnaissons que nous l’avions oublié…

Une société humaine, une nation, est d’abord une collectivité sociale partageant langue et histoire. C’est loin d’être le cas de la Belgique francophone. Je préfère de loin me savoir descendre des francs vaillants que de ces gaulois qui ont peur de tout (voir principe de précaution) et notamment que le ciel leur tombe sur la tête. Oui, je partage tout à fait le projet de séparation de la Belgique francophone de la Flandre. Anvers deviendra la capitale de la Flandre, Bruxelles deviendra une ville indépendante comme cela existe déjà. La séparation en deux pays ou régions ne devrait pas affecter une cohabitation déjà bien ancrée dans les pratiques des gens du Nord. Mais en plus je souhaite voir la Belgique des francophones rejoindre la communauté française. Du coup, je rapatrierais tous les exilés fiscaux partis dans la partie française de la Belgique (ce qui sera une bonne affaire pour nos finances) et je rendrais service aux belges français ainsi qu’à leurs entreprises qui paieront moins de charges et d’impôts. Car si les impôts sur la fortune n’existent pas en Belgique, par contre la fiscalité des ménages et les charges des entreprises y sont bien supérieures à celles de la France. La région Belge se débarrassera d’un roi pas vraiment indispensable et réalisera des économies d’échelle sur ses charges gouvernementales. Enfin nous profiterons de l’immense gentillesse et de l’humour de ces peuples du Nord capables de faire disparaitre un train. Ces régions francophones méritent mieux qu’une cohabitation détestable avec les flamands. D’ailleurs à la réflexion, peut être que je me plante ! Ce sont les Belges qui devraient revendiquer qu’on leur rende la France.  Après tout, des gens capables de faire disparaitre un train avec ses passagers et de faire venir vers eux de riches contribuables en auraient bien le droit*.

[1] Je recommande aux lecteurs intéressés de se procurer l’ouvrage de Lily Portugaels et Charles Mahaux ; » LIEGE, ardente et turbulente. Éditions du Perron1994

[2] Daniel Boorstin, «  Les découvreurs » Robert Laffont1992 (page 489)

*Le lecteur attentif aura compris que je fais de l’humour 😉 ( à peine!)

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A propos de l'auteur

Denys

Denis Ettighoffer, est un des spécialistes français reconnus dans l’étude projective de l’impact des NTIC (Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication). Ses nombreux livres sont autant de contributions à la réflexion sur les évolutions des sociétés, des modèles économiques et organisationnels. Sa spécificité réside dans sa capacité à analyser le présent, pour en extraire les orientations économiques et sociétales stratégiques pour les décennies à venir. Le voilà lancé dans une aventure comme il les aime, être reconnu à la fois par son imagination (pas le plus dur !) mais aussi comme un bon artisan de l’écriture romancée ( et ça c’est pas gagné !)

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