La sortie du livre « Arianna Musicienne Rebelle » attire une fois de plus l’attention du lecteur un peu curieux de découvrir cette série d’ouvrages interactifs qui se lit en écoutant la musique que vivent, jouent ou écoutent les protagonistes. Voici ce qu’écrivait un ami du chef d’orchestre Drago Doudko, qu’avait rencontré Arianna, à l’organisateur du concours pianistique d’Annecy de Mai 2017 :
« Dire quelques mots sur Armonie Bolhmen. Pas facile. C’est une « pianiste virtuose, prometteuse ». Son vrai prénom est Arianna. Elle compose certaines de ses interprétations. Elle a un tempérament de chiendent ! Mais c’est vrai, elle est d’un charme ravageur. Pourtant on sent vite qu’elle n’en a pas toujours conscience. Elle est cash ! Car s’il fallait encore en rajouter dans la description de cet ovni musical, je dirais qu’elle « joue à sa façon ». Pour Armonie, la qualité d’une interprétation ne doit pas être liée à l’unique performance technique du musicien mais plutôt à sa façon de faire passer les émotions de la musique au plus grand nombre. Armonie Bolhmen est une « missionnaire » qui fait de la musique une façon de goûter aux émotions de la vie. Cela explique son refus de multiplier les prestations dans des salles de concerts traditionnelles au bénéfice de lieux publics qui lui permettent de toucher ceux qui n’y viennent jamais. Pour cela elle n’hésite pas à se produire de façon anonyme dans les lieux les plus inattendus. Ne l’a-t-on pas vue dans le métro de Londres en Avril dernier où elle jouait du violon, un instrument qu’elle adore car, d’après elle, il exprime à merveille les sentiments du musicien. Bien malin est celui qui arrivera à cerner son jeu capricieux, changeant de styles plus souvent que de saisons, exaspérant de facilité apparente mais toujours en mesure de vous capturer l’oreille. Cette jeune femme n’est pas seulement une musicienne, c’est une sorcière des sons. Elle est capable de passer des heures à travailler sur une partition de deux ou trois lignes. Prolifique, elle compose des arrangements originaux à partir de partitions classiques comme si elle voulait en corriger les imperfections ou en enrichir la trame dramatique ou mélodique.
En la voyant s’approcher d’un piano je me dis que celui-ci doit d’avance en frissonner de plaisir ou de terreur. L’écouter jouer Ravel, reprendre de façon très personnelle certaines des pièces de Chopin ou revenir sur les airs de Litz, passer par Brahms ou rendre un hommage appuyé au génie de Rachmaninov est toujours l’occasion de se faire surprendre. Si je devais comparer le jeu d’Armonie avec celui d’une autre pianiste de talent, je penserais à sa compatriote Khatia Buniatishvili qui comme elle a un touché fougueux. Parfois un peu trop, ce que les puristes ne manquent pas de lui reprocher, oublieux que chaque interprète a toute liberté de jouer une pièce, encore une fois, « à sa façon » ! Il suffit de l’écouter jouer une sonate de Prokofiev (N°7/opus 83) pour avoir une idée concrète de son tempérament… et de la maitrise de son art ! Après quelques minutes passées avec la jeune femme on comprend qu’on se frotte à un caractère bien trempé, peu enclin aux concessions. Son regard attentif laisse l’impression d’être constamment aux aguets. Comme si derrière des yeux magnifiques vivaient des mystères qu’elle seule pourrait nous dévoiler. Enfin la distance qu’elle semble toujours imposer à ses interlocuteurs ne fait qu’attiser la curiosité sur son origine et son histoire dont on ne sait rien, en tous cas pas grand-chose si ce n’est son enfance en Allemagne de l’Est, que sa mère s’est tuée dans un accident de voiture et que son père travaille dans une entreprise de sécurité en Autriche.
Je garde le sentiment que la musique est devenue pour Armonie Bolhmen son langage privilégié et une protection dans ses rapports avec son public, ses admirateurs. Cette toute jeune femme a un jour fait irruption sur la scène publique et charmé les plus irréductibles en nous imposant sa façon de voir et d’utiliser la musique. Lors de notre première rencontre, elle me confia : « On ne chante plus dans la rue, on ne joue pas de musique dans vos écoles, on ne fait plus aimer la musique, donc les émotions que vous pourriez partager ensemble. » Et de conclure, avec l’audace et l’insolence de sa jeunesse : « Vous faites une musique de snobs, pour une élite qui fréquente les temples traditionnels de la musique que moi je veux dans la rue. Mon rêve secret est de voir un jour les gens s’arrêter et danser puis chanter avec moi sur des musiques populaires comme le vivent les autres peuples chantants d’Europe et au-delà ». Fantasque jusqu’à exaspérer ? Jusqu’où ira cette jeune prodige au tempérament déjà – trop ? – affirmé. Avec plus de 1 million de « followers » de ses vidéos à travers les réseaux sociaux, sans jamais avoir officiellement enregistré, Armonie Bolhmen est un phénomène montant au firmament de la notoriété et dont je me demande si, tel « Icare », elle ne va pas chuter un jour, brutalement abandonnée aussi vite qu’elle aura grimpé les marches de l’Olympe des artistes. » J’attends avec curiosité et impatience de la voir tenir son rang dans ton concours pianistique de Mai. Amicalement. Nicolas.