Si Isaac Asimov a inventé les trois lois de la robotique, on peut affirmer que Carlo Cipolla a inventé les cinq lois fondamentales de la stupidité humaine. Ce jour-là, nous étions tout un groupe de cadres d’une importante société française à discuter et à commenter le problème que nous posait la malhonnêteté d’un salarié de l’entreprise. L’un d’entre nous était particulièrement virulent et dans sa colère se mit à vitupérer contre tous ces salariés. Vous savez : les « sans dents » qui ne valent pas tripettes et auxquels il ne fallait jamais faire confiance. Ce qui m’a profondément irrité, c’est que mes collègues présents se mirent à acquiescer et pour certains à en rajouter dans le dénigrement de leurs subalternes. La moutarde me montant au nez, je leur fis observer que notre groupe social de cadres devait, selon la loi de gauss, se composer lui aussi de crétins, de malhonnêtes ou de gens formidables et que nous ferions mieux de la fermer. Je n’ai jamais oublié cet évènement qui ne me fit pas que des amis.

Aujourd’hui en vous invitant à la découverte des « Lois fondamentales de la stupidité humaine », je me remémore la mine stupéfaite ou outragée de certains. Comment pouvais-je émettre une telle observation ? Je trahissais ma classe. Carlo_Maria_Cipolla l’auteur de ce petit essai sarcastique est un économiste italien qui a eut aussi l’occasion de constater que la crétinerie et la stupidité étaient une maladie commune à l’espèce humaine. Pour ce dernier, la probabilité qu’un individu se comporte de façon stupide était indépendante de toutes les autres caractéristiques de cet individu : « Est stupide celui qui entraine une perte pour un autre individu ou un groupe d’autres individus, tout en n’en tirant pour lui-même aucun bénéfice et en s’infligeant éventuellement des pertes ». Et de constater plus loin que : « L’individu stupide est le type d’individu le plus dangereux » et il l’est d’autant qu’il occupe un poste important dans la société. Sa faculté de nuire devient alors considérable.

Carlo Cipolla, qui visiblement connait bien son petit monde, n’oublie pas néanmoins que la faune que nous côtoyons se compose aussi de bandits intelligents (le bandit crétin s’élimine en fait de lui-même). Sans scrupule, cette faune qui se glisse dans tous les rouages de notre société tire par tous les moyens un avantage pour lui et ses acolytes au détriment d’un tiers. Cipolla affirme encore que les crétins (qu’il décrit rappelons-le, comme des individus qui, par leurs actions, entrainent un gain pour un tiers tout en causant une perte pour eux-mêmes) ignorent en général à quel point les gens stupides sont dangereux. Je nuancerai. Je pense que dans notre société, les soi-disant crétins sont des gens qui manquent simplement de courage. Ils savent mieux que quiconque la fausseté des arguments parfois utilisés pour justifier une décision économique ou politique. Mais ils s’en arrangent.

Par faiblesse, des membres brillants des équipes aux manettes, sortis majoritairement de grandes écoles, perdent petit à petit toute originalité pour se couler dans les « bétasseries » de leurs ainés ou de leurs supérieurs par peur de casser les codes de leur caste, de leur groupe social. Le désir de se couler dans le moule aura été plus fort que la résistance à des analyses partielles ou partiales, le renouvellement ou la défense d’idées nouvelles. En cela ils rejoignent le bal des crétins en laissant leurs concitoyens sans défense face à des dirigeants stupides et des brigands manipulateurs. Dans notre intérêt à tous, courrez vite vous procurer ce petit opuscule qui devrait devenir votre livre de chevet après celui-ci « Indignez vous » de Stéphane Hessel.

Si vous avez pensé que j’avais quelqu’un à l’esprit en concluant ce papier…vous aviez raison ;-)) Retenez ceci: « Est stupide celui qui entraine une perte pour un autre individu ou un groupe d’autres individus, tout en n’en tirant pour lui-même aucun bénéfice et en s’infligeant éventuellement des pertes ».

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A propos de l'auteur

Denys

Denis Ettighoffer, est un des spécialistes français reconnus dans l’étude projective de l’impact des NTIC (Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication). Ses nombreux livres sont autant de contributions à la réflexion sur les évolutions des sociétés, des modèles économiques et organisationnels. Sa spécificité réside dans sa capacité à analyser le présent, pour en extraire les orientations économiques et sociétales stratégiques pour les décennies à venir. Le voilà lancé dans une aventure comme il les aime, être reconnu à la fois par son imagination (pas le plus dur !) mais aussi comme un bon artisan de l’écriture romancée ( et ça c’est pas gagné !)

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